Le vendredi 5 octobre, nous avons eu le bonheur d’accueillir Aurélia de WHOLE, Karine de Pieds nus dans le ciel et Camille, alias Lilacam de Fabriqué en Utopie, pour partager avec elle leur passion et leurs pratiques autour de la teinture végétale.
Gage de couleurs uniques, vibrantes et subtiles (car les plantes ne contiennent pas qu’une seule molécule colorante, mais un cocktail riche de couleurs qui résonnent en harmonie), la teinture naturelle est un art ancestral tombé dans l’oubli puis redécouvert et remis au goût du jour par des producteurs, artisans, créateurs ou explorateurs particuliers.
La teinture naturelle, qu’est-ce que c’est ?
La teinture naturelle est simplement le fait d’utiliser des colorants issus de sources naturelles (végétales, animales notamment) afin de teindre des fibres textiles. Ainsi, le process consiste le plus souvent (avec des exceptions notables telles que l’indigo) à extraire un colorant d’une plante par décoction : on fait bouillir des peaux d’oignons dans de l’eau, par exemple, et le bain prend alors une belle couleur jaune orangé : ça y est, l’extraction des principes tinctoriaux est faite ! Cependant, cela ne suffit pas pour teindre du tissu de manière durable. Le plus dur est de fixer la couleur dans le tissu. On doit ainsi procéder à une étape préalable à l’extraction et à la teinture : le mordançage. Ce mot-clef, que vous rencontrerez certainement si vous vous intéressez à la teinture naturelle, désigne une étape essentielle : celle de préparer la fibre à accueillir la couleur, par l’emploi de “mordants” qui feront le lien entre la fibre à teindre et la molécule colorante (un peu comme un scotch double face, le mordant a des affinités à la fois avec la fibre et la couleur et permet ainsi de fixer la teinture de manière durable et résistante). Traditionnellement, on utilise comme mordant l’alun ou le fer, mais d’autres méthodes encore plus écologiques sont développées : lait de soja, mordants végétaux…
Bref, vous l’aurez compris, la teinture naturelle est un procédé bien plus long à réaliser que la teinture chimique. Elle est aussi plus changeante, plus vibrante : d’une plante à l’autre, d’une année de récolte à l’autre, d’un sol de culture à l’autre… on peut avoir des résultats de couleurs très différentes pour une même espèce végétale. C’est une des raisons pour laquelle la découverte de la synthétisation des colorants chimiques à la fin du XIXème siècle a plongé l’art ancestral de la teinture naturelle dans la désuétude pendant deux siècles.
Mais depuis les années 1990, quelques passionnés se penchent peu à peu sur la question, redécouvrent ces pratiques, mettent en place des initiatives… Depuis 2006, un symposium international réunit tous les deux ans des experts, producteurs, artisans du monde entier. Plus récemment, on assiste à un véritable regain d’intérêt de la part des créateurs mais aussi de particuliers qui explorent cette pratique très riche, écologique et vertueuse (vous n’aurez qu’à taper #naturaldye sur instagram pour voir l’ampleur du phénomène !). De nouvelles marques lancent des produits teints avec des plantes, des ateliers se spécialisent dans la teinture à façon, de nouveaux fournisseurs proposent des metrages de tissus en “prêt-à-teindre”, des initiatives de production locale de plantes tinctoriales se mettent en place… D’autre part, des ateliers d’initiation se développent, des livres sur la teinture végétale se vendent comme des petits pains, des marques mettent en place des kits de teinture…